Standing in the Way of Contrôles Fiscaux

Dimitri Barrois

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Dimitri Barrois

Avocat Fiscaliste - Cabinet WIRE

L’objectif de cet entretien est d’élucider le paradoxe qu’incarne Dimitri Barrois. Comment un homme sympathique, particulièrement drôle et curieux, grand passionné de football, s’est-il retrouvé avocat fiscaliste réputé ? Spécialiste des contentieux, des mécanismes d’impatriation et des redressements fiscaux, il exerce aujourd’hui au sein du cabinet Wire, à Bordeaux et Paris. Dimitri Barrois ne correspond pas vraiment à l’image classique de l’avocat fiscaliste. L’homme parcourt la France chaque année au moment de la parution de la loi fiscale pour expliquer les nuances, changements et nouvelles complexités de la fiscalité, et s’est imposé au fil des années comme un expert reconnu et sollicité par des clients particuliers et entreprises aux prises avec l’administration fiscale. Et pour autant tous les week-ends, il joue à la Pala, au padel, et reste un fidèle supporter des Girondins dans un stade Matmut pourtant bien dépeuplé. Nous le rencontrons lors d’un déjeuner à Bordeaux. Il est détendu, profitant d’un répit inattendu : cette année, en raison des aléas politiques, la nouvelle loi fiscale n’a pas été publiée dans les délais – une première depuis 1962, me précise-t-il.

04 février 2025 – Bordeaux

Parcours personnel

Si vous deviez vous résumer en cinq dates ?

  • 12/03/2011 – 01/05/2013 – 19/03/2019 : Naissance de mes enfants
  • 09/05/2019 : Mariage
  • 12/07/1998 : Victoire de la France en coupe du monde de Foot

Comment un jeune cool et sympa, passionné de football, devient-il avocat fiscaliste ?

Je ne vois pas vraiment de paradoxe ! En tant qu’étudiant, je n’avais pas les moyens de passer directement le concours d’avocat après mes études. J’ai donc commencé à travailler comme juriste en entreprise. C’est là que j’ai constaté que les dossiers les plus intéressants étaient toujours confiés aux avocats. Mon envie d’exercer ce métier est née de cette observation.
J’ai ensuite intégré un grand cabinet de conseil à Paris, tout en négociant la possibilité de passer mon diplôme d’avocat en parallèle. Très vite, j’ai été attiré par le droit fiscal, l’une des disciplines les plus complexes et techniques du droit, aux côtés du droit du travail. Puis, en fondant mon propre cabinet, je me suis naturellement orienté vers le contentieux, qui offre souvent les dossiers les plus « rock’n’roll ». De la même façon, j’ai développé une expertise complémentaire dans les formalités d’impatriation et d’expatriation.

Y a-t-il plus de contrôles fiscaux aujourd’hui qu’auparavant ?

Oui, sans aucun doute.

1500 contrôleurs supplémentaires ? Comment sont-ils formés aussi rapidement ?

C’est effectivement une question cruciale. Cela rend notre travail d’autant plus difficile, car il est essentiel de vérifier scrupuleusement les demandes et décisions de l’administration fiscale.

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Quels sont les « red flags » qui peuvent déclencher un redressement fiscal ?

Les principales alertes concernent les incohérences entre différentes déclarations. Toute déclaration effectuée auprès d’un organisme officiel est susceptible d’être recoupée, ce qui impose une grande vigilance.

Les réseaux sociaux sont maintenant scrutés : un train de vie en décalage avec les revenus déclarés peut éveiller les soupçons. De plus, toute anomalie statistique peut attirer l’attention.
Pour les entreprises, une domiciliation suspecte ou incohérente est un signal d’alerte majeur.

Des innocents peuvent-ils se retrouver en redressement fiscal ?

Quels sont les risques concrets en cas de fraude fiscale ?

En France, la procédure fiscale suit une véritable escalade. Tout commence par un contrôle. S’il révèle une erreur ou une fraude, un redressement est appliqué. Les sanctions sont relativement progressives comparées à d’autres pays comme l’Espagne ou l’Italie :
• Une pénalité de 10 % en cas de simple défaut de paiement,
• 40 % si l’administration estime qu’il y a eu une intention délibérée d’échapper à l’impôt,
• 80 % si une organisation frauduleuse a été mise en place,
• Jusqu’à 100 % en cas de provocation manifeste à l’égard de l’administration.
En parallèle, certaines fraudes peuvent également donner lieu à des poursuites pénales.

Peut-on vraiment aller en prison pour fraude fiscale ?

Après l’abandon du dispositif appelé le « verrou de Bercy », qui encadrait la poursuite pénale des infractions financières, désormais, tous les dossiers présentant certains critères sont déposés sur le bureau du Procureur de la République.
En pratique, le procureur peut solliciter l’avis de l’administration fiscale avant de décider d’engager des poursuites. Si le contribuable a reconnu son erreur et mis en place un échéancier de paiement, il peut échapper à ces poursuites.
En cas de poursuite pénale, il est possible d’être condamné à une peine de prison.
En pratique c’est plutôt une peine avec sursis qui est décidée.
Le but est également d’obtenir que le contribuable soit condamné personnellement pour un défaut de son entreprise qui pourrait être mise en liquidation.

Est-il normal que les exigences soient plus strictes pour les responsables politiques ?

A mon avis oui.


Si ceux qui établissent les règles ne les respectent pas, la faute est plus grave, et il est logique que les sanctions soient renforcées.
Le but de la peine de prison est de protéger la société. Ils la mettent en danger avec ce comportement selon moi.

Y a-t-il un profil type du fraudeur fiscal ?

Non, car la complexité du Code des impôts expose tout le monde à des erreurs.
Toutefois, lorsqu’une situation s’envenime au point de devenir un contentieux pénal, certains traits communs émergent. On retrouve ceux pour qui le principe même de l’impôt est contestable et qui refusent tout compromis.

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La frontière entre optimisation fiscale et fraude fiscale est-elle claire ?

En revanche, si l’on met en place un montage destiné à masquer la réalité afin d’échapper à l’impôt, on bascule dans la fraude. Dès qu’un document ne reflète plus fidèlement la situation économique réelle, il y a un problème.
Cela dit, la frontière a longtemps été plus floue. De nombreux contribuables se sont laissés séduire par des montages fiscaux agressifs proposés par des conseillers peu scrupuleux. Ces dernières années, la législation s’est durcie, y compris contre les intermédiaires facilitant l’évasion fiscale.
En tant qu’avocat, il m’arrive de recevoir des clients qui me présentent un schéma qui pourrait être considéré comme frauduleux en me disant « Voilà ce que vous allez faire ». Dans ces cas-là, mon rôle est de refuser et de les avertir des risques encourus.

Où en est-on avec les comptes en Suisse et les paradis fiscaux ?

Aujourd’hui, l’évasion fiscale est beaucoup plus compliquée. La coopération entre États s’est considérablement renforcée, rendant la dissimulation de fonds plus risquée.

Quels sont les plus gros redressements : particuliers ou entreprises ?

Ce n’est pas comparable.
Les redressements d’entreprises atteignent des montants bien plus élevés, par exemple en matière de prix de transfert. Il s’agit de la valorisation des biens ou services échangés entre sociétés d’un même groupe situés dans des pays différents, pour un prix parfois sous-évalué ou surévalué ce qui peut limiter l’impôt en France.
L’administration fiscale peut alors requalifier ces transactions et appliquer un redressement sur des montants très élevés.
Certaines administrations fiscales étrangères adoptent une approche plus coopérative. A l’étranger, il peut être courant de consulter l’administration en amont pour éviter tout malentendu. En France, la culture est différente, mais cela évolue. Il existe un dispositif « le rescrit fiscal », qui permet d’obtenir une position officielle de l’administration avant d’agir. Je l’utilise parfois mais ce n’est pas la norme.

Un dernier mot sur les Girondins de Bordeaux ? Quel est ton état d’esprit aujourd’hui ?


J’ai commencé à suivre les Girondins en 1997, à mon arrivée à Bordeaux depuis Lille. À l’époque, le club vivait une belle période, avec le titre de champion de France en 1999, avec ce fameux match à la 22ème journée et les quatre buts en 30 minutes contre l’OM ! Et puis en 2009, je me souviens encore des 90 000 personnes aux Quinconces pour fêter le sacre…
Aujourd’hui, la route semble longue, mais il y a encore beaucoup de jeunes supporters au stade. J’aime me dire qu’ils seront témoins de la remontée, et que ce sera encore plus beau quand on y arrivera !

les recos d'Atypical

ses rubriques atypiques

007 In Bordeaux

Une course-poursuite à moto sur le pont Chaban-Delmas, avec James Bond tentant d’échapper à ses poursuivants en sautant sur un immense bateau de croisière passe sous le pont.

Bordeaux en 2050

J’aimerais que les vins de Bordeaux reprennent un peu de Hype, que Bordeaux soit plus cosmopolite, qu’il y ait moins de pluie, que les transports soient facilités et bon Les Girondins en ligue des Champions !

Missing in Bordeaux

La ligue des Champions!!!

C’était mieux avant ou pas?

Bordeaux s’est clairement amélioré sur de nombreux aspects : la ville est plus belle, plus grande, plus ouverte. Mon seul point d’inquiétude concerne ces nouveaux quartiers ultra-construits près de la gare ou à Ginko… C’est un pari risqué, tout dépendra de leur évolution mais ça sent un peu le quitte ou double!

 

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