12 février 2025 – Bordeaux
Si vous deviez vous résumer en cinq dates ?
- 10 décembre 2011 : Le jour de mes 8 ans, j’ai fait ma première expérience en soufflerie.
- Avril 2019 : J’ai 15 ans et je deviens champion du monde en dynamique à 4 aux championnats du monde en soufflerie.
- 2019 : Je fais mon premier saut en parachute en autonomie après une formation PAC (Progression Accompagnée en Chute), après avoir débuté les sauts en tandem dès mes 13 ans.
- Automne 2021 : Début de mon équipe en Freefly constitué de 3 personnes : deux performeurs (dont je fais partie) et d’un vidéoman.
- 2022-2024 : J’ai remporté toutes les compétitions auxquelles j’ai participé en freefly, notamment les championnats du monde et les coupes du monde.
Pouvez-vous expliquer les différences entre les disciplines en soufflerie et en parachutisme?
En soufflerie, on a plusieurs compétitions :
- Le vol dynamique (en solo, à 2 ou à 4) : on évolue en trois dimensions avec une routine préparée.
- Le solo speed : discipline chronométrée où il faut réaliser un parcours le plus rapidement possible.
En parachutisme, on retrouve :
• Le freefly : discipline artistique qui implique deux performers et un videoman, notée selon des critères techniques et artistiques.
• Le freestyle : similaire au freefly mais avec un seul performer et un videoman.
• Le vol relatif : plusieurs parachutistes doivent exécuter un programme de figures en restant sur le ventre.
• Le wingsuit : pratique avec une combinaison ailée qui permet de planer avant l’ouverture du parachute. (Attention à ne pas confondre avec le base jumping, qui consiste à sauter dans le vide entre deux Montagnes, immeubles ou autres, cela n’a rien à voir avec mes disciplines !)
Comment se déroulent les compétitions, comme la Coupe du Monde?
Pour la soufflerie, elles ont lieu une année sur deux sous l’égide de la Fédération Aéronautique Internationale. Les épreuves durent trois jours et combinent des routines imposées et libres, notées selon des critères de difficulté et d’esthétique.
Pour le parachutisme, les championnats de France se déroulent en été, les compétitions internationales suivent. Chaque discipline a ses propres règles, mais l’objectif reste d’exécuter des figures le plus proprement et harmonieusement possible.
Comment gérez-vous le risque dans ces disciplines extrêmes?
Le parachutisme repose sur des protocoles très stricts. Chaque premier saut commence par une formation complète sur les positions en chute libre et le maniement du parachute.
Nous avons deux voiles distinctes : une principale et une de secours, cette dernière étant pliée par un professionnel tous les ans. Il faut savoir que cette seconde voiles de secours, est bien plus solide et efficace encore que la voile principale, on est loin du Plan B !
De plus, un appareil de sécurité peut déclencher l’ouverture automatique en cas de besoin.
Les accidents restent extrêmement rares au regard du nombre de sauts réalisés, mais ils sont très médiatisés donc cela crée une impression de dangerosité qui n’existe pas en réalité. Par ailleurs, un peu comme dans l’industrie aéronautique, la communauté s’appuie beaucoup sur le retour d’expérience pour améliorer en permanence la sécurité. Chaque mini incident est documenté et de nouvelles procédures de sécurité mises en place

Votre père vous a initié à la soufflerie. Comment passe-t-on du vol indoor à la chute libre?
Ce sont deux disciplines très différentes mais complémentaires. La soufflerie permet de travailler la technique en chute libre dans un environnement contrôlé. En soufflerie, un déplacement de quelques centimètres peut vous faire dévier, alors qu’en chute libre, on a plus d’espace et de liberté.
Une minute en soufflerie équivaut à un saut d’avion, sachant que pour faire un saut d’avion d’environ 30min, cela se découpe en 15min de montée d’avion, 1min de saut, 3min sous voile, puis environ 10min pour plier son parachute principal. La soufflerie nous permet de progresser en beaucoup moins de temps que le parachutisme.
Justement, en quoi consiste votre entraînement ? Quels sont les atouts nécessaires?
Il faut beaucoup de gainage et d’explosivité. En plus des sessions en soufflerie et en parachutisme, je fais du renforcement musculaire et du cardio. J’ai aussi un entraîneur pour structurer ma progression.
Comment vit-on d’un sport aussi confidentiel?
C’est très difficile car il n’y a pas de prize money important. La plupart des athlètes vivent en devenant moniteurs, et les sponsors financent l’équipement (combinaison, casque, parachute). Certains centres de parachutisme prennent aussi en charge les déplacements. De plus la Fédération Française de Parachutisme nous finance nos sauts d’entraînement.
Avez-vous d’autres activités professionnelles ou études en parallèle?
J’ai passé mes années de première et terminale en candidat libre car je voyageais trop pour les compétitions. Aujourd’hui, je me concentre sur mon école de coaching, Medjay Freefly, basée à Mérignac pour la soufflerie et à La Réole pour le parachutisme.
Quel est le profil des autres compétiteurs ? Y a-t-il un équilibre homme-femme?
Dans le parachutisme, environ 25 à 30 % des pratiquants sont des femmes. Il y a aussi des monitrices, mais le métier demande beaucoup de force physique, c’est très dur physiquement, ce qui peut être un frein.
Quels sont vos objectifs pour la suite?
Continuer à performer en compétition, je suis maintenant passée vidéoman, et c’est très différent comme exercice. On doit être beaucoup plus concentré sur l’image, sur la caméra, toutes les images que je ne parviens pas à filmer ne seront pas notées donc il faut être très concentré mais en temps par rapport au performer, je n’ai pas du tout à me soucier de l’esthétique de mon corps, je suis beaucoup plus libre.
Et par ailleurs, je souhaite continuer à développer Medjay Freefly pour transmettre mon expérience et accompagner la nouvelle génération de parachutistes et de pratiquants en soufflerie. C’est un sport extrêmement intense, du haut de mes 21 ans, il y a déjà des petits jeunes qui me rattrapent !